L'ours blanc nous narrait son expérience et sa philosophie sur le forum bulle-immobilière.org . Il nous a quitté le 10 février 2007.

C'est pour lui rendre hommage que j'ai retranscrit ici ces contributions les plus intéressantes.


Gold

Le taux d’interet comme un prix (20/11/2006)

Comme d'hab, je vais faire entendre une petite musique différente, sans méchanceté aucune, histoire de faire un pas de côté pour voir un peu différemment. Et donc, sous un angle inhabituel, tenter de réfléchir.

Un taux d'intérêt c'est un prix. Mais le prix de quoi ?
Le prix d'un renoncement. Renoncement à quoi ? Renoncement à ce qu'on appelle la préférence pour le présent, la PP.
En effet, l'homme préfère toujours une satisfaction immédiate à une lointaine, même pas certaine du coup, de surcroît.
Si je vous propose de choisir entre vous offrir 100 000 € aujourd'hui et les mêmes 100 000 € en janvier 2022, votre choix est fait ; n'est ce pas ?
L'économie n'est bâtie que sur la psychologie, c'est d'ailleurs pourquoi les meilleurs financiers sont d'anciens psy, et en plus, plus rigolos que les banquiers traditionnels, parce qu'avec eux, vous risquez pas de rigoler trop souvent.
Donc, les hommes préfèrent le présent. Pour les faire renoncer à leur présent, présent de certitudes, il faut leur donner quelque chose. Et cette chose c'est l'intérêt. D'autant que l'avenir appartenant au hasard et à lui seul, comme le chante si joliment Jacque Brel, il y a un autre élement qui entre en jeu : la confiance. Pour se dessaisir de présent en faveur de l'avenir, encore faut-il avoir une raisonnable conviction que celui-ci va advenir.
Voilà, grossièrement, le décor psycho est planté.

Alors les taux d'intérêts et leur prix. Ben le prix n'est que la confrontation des désirs ! Entre la jouissance immédiate, et la confiance en un avenir meilleur, car gonflé des intérêts accumulés. Et ça, ça varie bigrement selon les individus et chez un même individu au cours de sa vie.
En quoi cette question de désir à renoncer à la PP (préférence pour le présent) est-elle une question politique ? Hein ?
En quoi il y aurait une différence de nature entre taux longs gérés par le marché, les désirs donc (mais autrefois administrés) et taux courts administrés par des machins politiques, au sens large (donc comprenant les banques centrales dans cette acception).
En quoi cette "politique des taux" a-t-elle été un succès ? Bulle sur bulle !
Si on veut contrôler l'inflation, c'est la quantité de monnaie qu'il faut surveiller ; pas son prix.
Laissons les taux, tous les taux, se former par la vérité, la seule, qui les sous tend : le désir. Ici le désir de renoncer à la préférence pour le présent.

Ce ne sera nullement le paradis, mais vraisemblablement moins pire. Car on administre pas un désir sans le tuer !

P.S : je ne cherche nullement à vous plaquer des affirmations dans la figure. Je cherche à faire faire un (petit) pas de côté. Juste pour voir.
Parce qu'à entonner et réentonner tous ensemble les vieilles antiennes, on va, tous ensemble également, sauter du haut de la falaise. Comme les moutons de Panurge.

« Post assez original Pajala en effet.......

j'aurais juste une observation: on y retrouve uniquement le point de vue de l'homooeconomicus faisant des choix rationnels: consommer ou placer son argent (aux Marquises?).

La réalité du crédit et de la création monétaire ne comporte pas que celà: elle concerne surtout des consommateurs qui ont une forte "préférence pour le présent" (acheter sa maison, sa voiture,... à crédit au lieu d'épargner et d'attendre) et une "marchandise" (l'argent) dont la production est très élastique car seulement limitée par la notion toute relative de"solvabilité"et par le respect de ratios bancaires approximatifs.

Le prix de l'argent peut difficilement être fixé par le marché à partir d'une "rareté" (qui n'existe plus depuis 30 ans), sauf à annuler l'effet positif de la création monétaire sur la croissance ( pour mémoire: la croissance mondiale actuelle puise surtout sa force dans le crédit).

Le problème n'est pas la création monétaire en soi mais la limite qu'elle ne doit pas dépasser: entre un "étalon" (or ou autre) qui bloque la croissance et une politique laxiste des banques centrales qui crée une inflation plus ou moins visible et des bulles, il doit bien y avoir un juste milieux! »

Au fond, vous dites, à peu près, la même chose que moi, sauf sur :

« Le prix de l'argent peut difficilement être fixé par le marché à partir d'une "rareté" (qui n'existe plus depuis 30 ans) »

Et là, je retrouve, ce qui pour moi est une confusion assez commune, que ce serait la rareté qui serait un soubassement, alors que je m'époumone à essayer de faire comprendre que ce n'est pas la rareté mais le désir !
Ce que de nombreux syllogismes absurdes démontrent - tout ce qui est rare est cher, or un cheval borgne est rare, donc un cheval borgne est cher - absurde évidemment. Remplacez rare par désiré, et vous verrez où est l'arnaque.
C'est bien le désir (au sens générique) qui est le moteur des humains, et pas une quelconque appétence pour la rareté en soi.
À partir de cette compréhension, on peut regarder les choses, toutes les choses (et pas seulement "économiques") d'un autre oeil.
J'en profite pour rappeler une de mes préférées, qui est de Pajala et pas de Bossuet, celle-là :

La valeur n'est que la quantification du désir

Bien cordialement,
Pajala